DOSSIER « PRESSE »
GREVE GENERALE INTERPROFESSIONNELLE 31 MARS 2025

Les organisations syndicales fédérales, en front commun, appellent l’ensemble des travailleurs à se mettre en grève le 31 mars prochain :

  • Pour des pensions dignes.
  • Une carrière tenable.
  • Un pouvoir d’achat renforcé.
  • Des services publics de qualité.

Le gouvernement De Wever-Bouchez s’est moqué du monde. Il nous a annoncé un pouvoir d’achat en hausse et des améliorations des conditions de vie pour les travailleuses et les travailleurs.

Rien n’est au rendez-vous. Au contraire !

  • Les femmes sont clairement en ligne de mire. Elles vont souffrir !
  • Il faudra travailler plus longtemps pour des pensions rabotées.
  • La flexibilité va être étendue sans compensation.
  • Les malades vont être sanctionnés.
  • Des économies drastiques dans les services publics mettent en péril ce que nous considérons être le « premier pouvoir d’achat » des travailleurs les plus précarisés.
  • Il n’y aura pas d’augmentation des salaires dans les prochaines années.
  • Les 500 € de différences entre « ceux qui se lèvent tôt pour aller boulotter » et les chômeurs seront réalisés… par l’exclusion de 100.000 chômeurs !

Le droit de grève appartient à chaque travailleur. Qu’il soit syndiqué ou pas. S’il est membre d’un syndicat, il peut recevoir une indemnité qui compense, un peu, la perte de salaire. Elle est versée au départ d’une « caisse de grève » alimentée principalement par les cotisations syndicales. Il sera évidemment défendu face à son employeur, le cas échéant.  Mais il convient de rappeler que tous les travailleuses et tous les travailleurs, même s’ils ne sont pas syndiqués, sont libres de se déclarer en grève.

La FGTB de Verviers-Ostbelgien appelle donc l’ensemble du monde du travail à cesser le travail ce 31 mars.

Début avril, le gouvernement va déposer au Parlement une première « loi-programme » qui va mettre en œuvre progressivement l’accord gouvernemental de l’ARIZONA (les mesures de flexibilité vont être concrétisées comme les premières mesures dans les pensions).

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Le projet de société qui est porté est une catastrophe historique. Il contient une remise en question totale des valeurs contenues dans le Pacte social de 1944. Cet héritage de la Résistance organisait la Sécurité sociale, des services publics performants et une démocratie économique et sociale. L’Arizona va aggraver les inégalités. Il va exclure. Il va appauvrir les pauvres et il va continuer à enrichir les riches.

A l’exception des détenteurs de capitaux, aucune frange de la population ne sera épargnée.

Avant de détailler le catalogue des horreurs, quelques mots sur l’ambiance et le contexte général.

UN CONTEXTE ANXIOGENE

La révolution conservatrice portée par les vainqueurs des derniers scrutins se déploie dans un contexte qui alimente l’anxiété des populations.

  • La rapidité des bouleversements des équilibres mondiaux provoque une perte totale des repères de citoyens.
  • La progression de l’extrême droite partout ailleurs qu’en Wallonie inquiète les démocrates.
  • La vitesse des changements donne le vertige.

La société est littéralement tétanisée par la manière dont les pouvoirs distillent de nouvelles perspectives de… guerre.

La FGTB de Verviers-Ostbelgien rappelle l’engagement historique du mouvement ouvrier en faveur de la paix. Comme l’écrivait Anatole France au moment de la Première Guerre mondiale, « On croit mourir pour la patrie, on meurt en réalité pour les industriels » !

Nous nous souvenons qu’en 2008, nous avons été « saignés » pour « sauver les banques ». Nous nous souvenons aussi qu’après l’épidémie du Covid et la crise énergétique, l’Europe a lancé un grand « Green deal », un plan d’investissement public dans l’industrie pour organiser la transition énergétique. L’opération a surtout pris des allures de « greenwashing » généralisé.

Et aujourd’hui, de gigantesques moyens publics seraient mobilisés pour soutenir l’industrie de l’armement ! Qui va payer ? Au sein des majorités, les libéraux sont transparents : ce ne sera pas par de nouveaux impôts sur le patrimoine et les revenus du capital. Ce sont donc les revenus du travail qui passeront une nouvelle fois à la caisse.

Dans le même temps, on nous explique qu’il n’y aurait pas d’argent pour la santé, pour les pensions, pour les services publics, pour les chômeurs…

Pour rappel : la totalité des réductions de cotisation à la Sécurité sociale et de subsides salariaux fiscaux au profit des entreprises atteint plus de… 14 milliards (en 2024). Et la progression de ce montant (il était de moins de deux milliards avant 2000), va se poursuivre, annonce le gouvernement.

Pour rappel à nouveau :  l’impôt sur les sociétés rapporte aux finances publiques moins de… 14 milliards.

Conclusion : les entreprises, considérées dans leur ensemble, coûtent plus à l’Etat qu’elles ne contribuent aux financements des besoins collectifs dont elles profitent pourtant largement (infrastructures, formations, recherches et développement…) !

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Elles arrondissent ainsi leurs marges, distribuent des dividendes de plus en plus ronds, mais il n’est pas question de faire contribuer ce capital aux efforts collectifs !

Le gouvernement De Wever fait ainsi payer aux seuls travailleurs les cadeaux qu’il distribue au monde patronal. C’est sa priorité politique. Nous pouvons l’affirmer avec d’autant plus d’assurance qu’il ne propose aucune réponse aux défis majeurs de l’époque et aux risques civils qui n’ont pas disparu parce qu’on en parle moins :

  • Les conséquences du dérèglement climatique visibles partout – aucune nouvelle politique n’est prévue pour éviter une hausse de 4° par rapport à l’époque précédant la révolution industrielle -,
  • L’érosion de la biodiversité qui se poursuit dans une grande indifférence,
  • Les enjeux sur le cycle de l’eau qui ne sont jamais évoqués alors nous devons nous attendre à des augmentations tarifaires importantes liées aux nouvelles pollutions (notamment dues aux polluants éternels, les PFAS…),
  • La dépendance énergétique qui restera encore longtemps notre réalité,
  • L’absence d’autonomie de notre système alimentaire,
  • Le silence dans toutes les déclarations gouvernementales sur une nouvelle politique de redéploiement industriel – si ce n’est, en dernière minute, pour l’industrie de l’armement !

Et c’est sans dire un enjeu crucial qui a déserté tous les débats : les ressources (minérales et énergétiques) pour mener de front la transition numérique et la transition énergétique ne suffiront pas. En 2018 déjà, le directeur de recherche du CNRS, Olivier Vidal, écrivait déjà : « La consommation de nombreux métaux et de ciment a doublé depuis le début du XXIe siècle, et si la tendance continue, il faudra produire plus de métaux d’ici 2050 que l’humanité n’en a produit au cours de toute son histoire » (« Matières premières et énergie. Les enjeux de demain », éditions ISTE).

La Commission européenne vient d’ailleurs de relancer l’exploitation minière du vieux continent. Avec quelles conséquences ?

« Avec le Canada, l’Ukraine est le premier pays avec lequel la Commission européenne a conclu un partenariat pour les matières premières afin de sécuriser ses approvisionnements face aux monopoles chinois et russes » , souligne la journaliste française Celia Izoard (« La ruée minière au XXIe siècle – Enquête sur les métaux à l’ère de la transition », édition écocène Seuil, 2024, p.190)… La manière dont Trump envisage de solder la guerre en Ukraine est révélatrice de ses ambitions prédatrices sur ces richesses minérales ! L’auteur glisse aussi que l’industrie aérospatiale et celle des armes ont besoin des mêmes minerais que ceux nécessaires aux transitions numériques et énergétiques. Il n’y en aura donc pas pour tout le monde ! Qui va choisir ?

Nos craintes d’une guerre augmentent déjà les appétits du capitalisme.

Ces réalités défient l’avenir. Et pas seulement celui de nos enfants ! Le gouvernement regarde ailleurs. Dans nos assiettes !

NOTRE OBJECTIF : RESISTER ET FEDERER !

L’accélération des reconfigurations géostratégiques tétanise la société. Elle alimente un sentiment d’impuissance. Il n’est pas fondé.

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L’objectif que poursuit la FGTB de Verviers-Ostbelgien à travers la grève générale du 31 mars est d’abord de défendre les intérêts de ses affiliés et plus globalement ceux de l’ensemble des travailleurs.

Le recours à la grève permet ensuite de rappeler aux « décideurs » comme à la population qui, dans ce pays comme ailleurs, produit réellement la richesse. Les habituels discours patronaux de circonstance sur le coût économique de celle-ci en sont une preuve ! La FEB a l’habitude de dénoncer à la fois le coût du travail et celui… de la grève. On ne souligne jamais combien nos patrons coûtent cher à la société (voir les plus de 14 milliards de subsides salariaux et les moins de 14 milliards de recette de l’ISOC).

Enfin, la Régionale a participé à différentes mobilisations depuis décembre 2024. Elle a contribué au succès de la manifestation du 13 février en amenant à Bruxelles plus de 1.400 de ses affiliés. La journée du 31 mars s’inscrit ainsi dans une construction progressive, mais déterminée d’un rapport de force face aux différents gouvernements qui organisent une régression sociale sans précédent. Elle est aussi l’occasion pour nous de nous adresser à la population tout entière ;

  • Pour lui rappeler que quand nous faisons grève (et que nous choisissons d’amputer une partie de notre salaire !), c’est au bénéfice de tout le monde,
  • Pour expliquer aussi en quoi l’arsenal des mesures imaginées va impacter durement la vie des gens, tous les jours.
  • Pour l’inviter à nous rejoindre dans la contestation des politiques prévues, quelle qu’en soit la manière ! Pour dénoncer ensemble les ruptures des équilibres sociaux… 

Nous devons résister et répondre au défaitisme ambiant et à l’« àquoibonisme » généralisé…

Nous ne sommes pas impuissants face au « rouleau compresseur » gouvernemental.

Les recherches d’Erica Chenoweth, professeur à l’université Harvard (citée par Kohei Saito : « Moins ! La décroissance est une philosophie », éd. Seuil, 2024, p. 321), montre qu’« il suffit que 3,5% d’une population s’engage dans un mouvement de revendication non violent avec conviction pour que la société (…) connaisse des changements ». Ses études sont basées sur l’analyse de très nombreux conflits du XXe siècle (« Pouvoir de la non-violence », éditions Calmann Levy, 2021).

La FGTB de Verviers-Ostbelgien n’a pas la capacité de valider ou de contester cette approche. Elle nous intéresse surtout parce qu’elle rend l’objectif d’une contestation sociale productive… possible, crédible !

En février, la Régionale a mobilisé plus de 3,5% de ses affiliés pour la manifestation de Bruxelles. Si ce n’est pas déjà le cas, il nous faut maintenant convaincre au moins 3,5 % de la population. C’est à notre portée ! Faisons-le.

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CATALOGUE DES HORREURS

Le Pacte social de 1944 s’articulait sur trois axes :

  • L’amélioration du régime salarial de salariés
  • L’organisation d’un système de sécurité sociale fondé sur la solidarité
  • Un système de concertation sociale fondé sur le dialogue paritaire entre travailleurs et employeurs.

Amélioration du régime des salariés ? Que prévoit l’Arizona ?

  • Généralisation des heures supplémentaires (jusqu’à 360 heures) sans sursalaire et sans repos compensatoire (c’est la fin des 38 heures/semaine).
  • Possibilité de déterminer la durée du travail au niveau de l’entreprise.
  • Fin de l’indemnisation pour travail de nuit.
  • Fin de l’indemnisation pour le travail du dimanche.
  • Fin de l’indemnisation pour le travail des jours fériés.
  • Suppression des cinq jours de formation.
  • Elargissement des flexi-jobs à tous les secteurs.

Pour les agents de la fonction publique, il s’agit de réduire les protections du « statut » des agents et de systématiser dans les services publics les recours aux contrats à durée indéterminée. C’est la fin de l’indépendance de ces travailleurs vis-à-vis du pouvoir politique !

A noter que l’indexation automatique des salaires ne sera pas garantie à terme. Elle est d’abord trafiquée pour les allocataires sociaux (retardée de deux mois dans son application). Elle devra faire l’objet d’une concertation sociale au sein du « G10 » (la plus haute instance de concertation sociale interprofessionnelle). Sans accord à ce niveau (ce qui est prévisible), le gouvernement reprendra la main pour imposer sa vision du mécanisme !

Une sécurité sociale plus solidaire ? La vision de l’Arizona :

  • Pour les malades

Le malade est présumé fraudeur. Sa remise à l’emploi rapide (forcée ?) sera la norme :

  • Sanctions à l’égard des malades de longue durée que leur employeur juge « potentiellement » aptes à reprendre le travail,
  • Obligation pour les médecins de fournir un certificat d’aptitude en plus du certificat médical.
  • Activation plus stricte des malades de longue durée : un trajet de réintégration devient possible après le premier jour de maladie !
  • En cas de rechute, le droit au salaire garanti ne sera plus assuré qu’après 8 semaines de reprise de travail (contre 14 jours actuellement)



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  • Pour les pensionnés

De manière générale, les conditions d’accès sont renforcées :

  • Fin du régime des RCC (prépensions)
    • Création d’un malus pension (sanctionnant les départs à la pension anticipée pour les travailleurs qui ne totalisent pas 35 années de travail effectif)
    • Pas de reconnaissance de la pénibilité du travail, mais suppression des régimes préférentiels (dans la fonction publique essentiellement)
    • Suppression du taux ménage (le taux de 75% est remplacé par un taux isolé à 60%)
    • Périodes assimilées dans le calcul de la pension à 20% de la carrière (en dehors des périodes de soins et de maladie)
    • Assimilation des périodes chômées à un salaire fictif limité
    • Suppression de la pension de survie pour les non-pensionnés


  • Pour les chômeurs

L’assurance chômage n’indemnise déjà plus qu’un chômeur sur deux. De nouvelles mesures vont poursuivre la destruction de cette branche de la Sécurité sociale :

  • Limitation à deux ans maximums du droit à une allocation
  • Limitation à un an du droit à l’allocation d’insertion
  • Dégressivité accrue des montants de l’allocation

Ces mesures vont affecter particulièrement la Wallonie et Bruxelles. Il s’agit, selon l’expression de Bart DE WEVER, d’une réforme communautaire. La NVA est jusqu’ici la seule à officiellement l’assumer. Les Engagés et le MR ont manifestement abandonné, au sein de l’Etat fédéral, la défense des intérêts des Wallonnes et des Wallons.

L’exclusion de près de 100.000 travailleurs sans emploi du droit aux allocations de chômage organise un transfert de solidarité de la Sécu vers les CPAS et les communes qui n’auront pas les moyens de faire face. Les Villes et communes wallonnes les plus pauvres seront étranglées financièrement.

Une concertation sociale renforcée ? Ce n’est pas l’objectif de l’Arizona !

Alors que l’ensemble des droits des travailleurs est mis en cause par le gouvernement, les attaques directes ou indirectes des organisations qui les défendent se multiplient (dont la volonté d’imposer une personnalité juridique aux syndicats : l’unique objectif est de connaître l’état des caisses de grève !)

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L’idée est simple à comprendre : désarmer le monde du travail. Les droits des travailleurs sont convoqués dans un coin obscur de la scène pour passer un mauvais quart d’heure et, dans le même mouvement, réduire au silence ses défenseurs ! Pour un étouffement progressif et sans bruit….

Détruire le modèle social hérité de la Résistance, est-ce autre chose que revenir au régime… qui l’a précédé, mais qui avait été vaincu par les armes ?

Deux « catégories » sociales sont l’objet d’un acharnement particulier : les femmes et les jeunes.

Pour les femmes, l’aggravation de leur dépendance économique est au programme, d’une part (pas d’individualisation des droits sociaux, horaires « accordéon », augmentation des flexi-jobs rendant plus difficile le compléter les temps partiels, fiscalité injuste avec la diminution du quotient conjugal et la réduction d’impôt de frais de garde uniquement pour les personnes actives…). La précarisation de leurs conditions d’existence d’autre part  (limitation à deux ans des allocations de chômage qui touchera d’abord les femmes, le durcissement des conditions d’accès à la pension, la réduction de l’accessibilité aux services publics – crèches et soins de santé… – et pas de nouvelles protections contre les violences sur les lieux de travail…)

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En ce qui concerne les jeunes, l’augmentation des heures possibles de jobs étudiants est une aubaine pour le patronat. La diminution de l’âge légal pour ce travail passe de 16 à 15 ans et la possibilité de travailler jusqu’à 650 heures (au lieu de 475) va augmenter la compétition entre les jeunes (qui contribuent peu au financement de la Sécu) et les autres travailleurs. L’augmentation des heures de travail pour les étudiants masque un vrai problème : la précarité grandissante d’un nombre croissant de famille ne pouvant plus assumer le financement des études de leur(s) enfant(s)…

Une guerre est à nos portes. Mais elle est d’abord sociale !

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